Poète, écrivain, dramaturge et peintre, né en 1939, Breyten Breytenbach est sud-africain d’origine ; il deviendra par nécessité citoyen français dans les années 1960. L’expression par l’art et par l’écriture sera le principal témoignage de l’instabilité identitaire de cet homme aux multiples talents.
Du fait même de l’impossibilité de se définir en une identité unique, Breyten Breytenbach offre l’image la plus flagrante et la plus exposée de l’homme-artiste en quête de lui-même et d’une mémoire originelle, qu’une destinée maligne lui aurait dérobée. Considéré aujourd’hui dans le monde littéraire avec le respect que l’on accorde à ceux qui ont déjà fait leurs preuves, il est une référence incontournable pour les
écrivains sud-africains des trois dernières décennies, et l’un des plus grands poètes contemporains de langue afrikaans. Retour sur un parcours chargé d’embuches et d’engagement.
A l’origine enfant d’Afrique du Sud et Afrikaner blanc, Breyten Breytenbach s’inscrit très tôt dans une lutte contre des racines qui l’encombrent. Né dans la province du Cap, il comprend en effet l’horreur, dès son adolescence, du racisme fait loi sur la terre qui le porte. Cette révélation devient dès lors pour ce très jeune garçon la source d’une impossibilité de vivre en son pays, que seule la liberté apportée par l’exil lui permettra de dépasser ; un exil qu’il voit, alors, comme une simple étape transitoire, provisoire.
Mais très vite, telle une fatalité se resserrant sur son être, il rencontre « l’amour interdit », et s’aventure dans un mariage mixte qui le privera pour longtemps d’un retour espéré au pays de l’enfance.
En France depuis le début des années 1960, Breytenbach mène néanmoins le combat qui le tiraille. Il porte très loin sa croyance dans un monde différent et juste, fondant et dirigeant l’important mouvement de contestation anti-apartheid « Okhela ».
Une mission clandestine en Afrique du Sud au milieu des années 1970 le ramènera néanmoins dans son pays… Ironie du sort : arrêté et jeté au cœur de l’hostilité froide d’une prison gouvernementale, il est détenu pendant plus de 7 ans.
Soumis au même traitement que les militants noirs de l’époque, séparé des siens et de sa liberté, c’est dans sa geôle qu’il écrit ses oeuvres les plus poignantes, quasi-documentaires parfois (Confessions), empreintes de rêve et de surréalisme la plupart du temps.
The True Confessions of an Albino Terrorist, Mouroir et A season in paradise, restent ses oeuvres les plus connues se référant à cette période de sa vie. C’est à ce moment également que commencent à se mêler dans son écriture les langues de son identité éclatée – l’anglais et le français pour l’activité romanesque, l’afrikaans pour la création poétique.
Parmi les autres récurrences de la plume de ce témoin des Temps, on trouve l’Amour, dans des lettres adressées à ses parents et à sa femme ; la Culpabilité et l’Humanité, au sein d’hommages en direction de condamnés à mort, voisins de cellule ; le Souvenir et la Mélancolie, par l’évocation du pays de sa naissance et de ses vingt premières années (faune, flore, paysages, océans).
Dans le cadre d’une réflexion intense et obsessionnelle sur l’existence et le pourquoi de la vie, Breyten Breytenbach nous lèguera également des conversations, imaginaires avec d’autres poètes-dissidents, ou bien réelles, avec lui-même.
Points névralgiques de son écriture, une liberté sans borne de l’imagination, et une créativité linguistique incroyable. Car, dira-t-il lui même, « Le mot est un détroit, une bande de terre entre deux océans sombres… Le mot est aussi un enfermement, mais c’est le seul espace que je connaisse, le seul interstice de liberté« .
Ainsi, par la poésie et par le récit, Breyten Breytenbach nous offre à voir une identité troublée qu’il cherche sans cesse à redéfinir. Par la littérature et l’usage de mots profonds et justes, ce conteur nous raconte son histoire, elle-même inscrite dans l’Histoire du monde.
Quelques oeuvres… (ordre chronologique)